Lauren Oliver est une auteure surprenante ! Après plusieurs romans YA (la saga Delirium, ou plus récemment Absences) et une œuvre plus jeunesse (Lily et Po), la voici qui s'essaye à un autre genre avec Les intrus : la littérature adulte.
Depuis plusieurs années, Alice et Sandra hantent la maison de Coral River, observant les allées et venues de ses habitants. Mais quand Richard Walker, l’actuel propriétaire, décède, son ex-femme, Caroline, et ses deux enfants, Minna et Trenton, débarquent dans la demeure familiale en ramenant avec eux des bribes de souvenirs et un présent bien mouvementé !
Dès les premiers chapitres, Lauren Oliver nous présente des fantômes qui s'écartent des clichés habituels. Dans Les intrus, les fantômes n'ont jamais été aussi vivants : ils se chamaillent, mentent, critiquent, se souviennent, craignent le futur… Bien que mortes, Alice et Sandra sont ancrées dans la réalité et il en devient encore plus facile de s'attacher à elles ! Mais les vivants ne sont pas non plus en reste, bien que la distinction fantômes/humains reste relativement trouble : ce qui hante surtout la maison, ce sont les secrets et les non-dits !
Quant à moi, je n'arrête pas de penser à ce que Caroline a dit à Minna au sujet de la mort.
Elle n'est pas contagieuse, a-t-elle dit. Elle a peut-être raison. Et pourtant nous nous sommes installées dans les murs en vraies bactéries. Nous avons colonisé la maison, son isolation et ses canalisations, nous les avons faites nôtres.
A moins que ce ne soit l'inverse, que la vie ne soit contagieuse : un rêve enfiévré, une hallucination des sentiments. La mort est purification, purge, remède.
Malgré tous ces secrets, ne vous attendez pas à une intrigue qui maintient en haleine à coups de grands rebondissements : Lauren Oliver adopte ici un rythme lent. L'histoire des Intrus se savoure alors, doucement, comme pour mieux profiter de chaque mystère et de chaque révélation. Sans se précipiter, l'auteure présente ses intrigants personnages tout en dépeignant la si particulière maison de Coral River... Un autre protagoniste s'impose finalement : la demeure ne serait-elle pas finalement le centre de l’histoire ? Pièce par pièce, elle se dévoile : tantôt inquiétante, tantôt joyeuse, elle est finalement ce qui lie les vivants et les morts, le passé et le présent. Le découpage du roman est quant à lui original : chaque partie est consacrée à une pièce différente de la maison, ce qui donne l'impression au lecteur de connaître ce personnage atypique par cœur, jusque dans ses moindres recoins.
Les gens, songea Caroline, étaient des maisons. Ils pouvaient ouvrir leurs portes. On pouvait traverser les pièces qui les composaient, toucher les objets cachés dans les recoins. Mais quelque chose - la structure, l'installation électrique, le mécanisme invisible qui soutenait l'ensemble de l'édifice - demeurait invisible, simplement suggéré.
Les intrus est un roman qui peut surprendre par son style plutôt contemplatif, bien différent du dynamisme propre aux romans YA de l'auteur, qui se dévoile petit à petit. Lauren Oliver nous prouve ainsi qu’elle est à l’aise dans tous les genres ! Avec l’arrivée d’Halloween, les fantômes des Intrus arrivent donc à point nommé ! Mais rassurez-vous, ceux-là ne vous terroriseront pas. Pratique, donc, si vous souhaitez lire un récit teinté de fantastique sans risquer de cauchemarder le soir !
Les intrus de Lauren Oliver
Edition Hachette
384 pages - 19€